En se réveillant ce samedi matin, Asahi faisait face à un problème assez embêtant... Le voyage étant long entre le pensionnat et la maison de ses parents adoptifs, il avait été décidé que ces derniers lui enverraient ses valises, que ce serait plus simple ainsi. Le jeune homme avait donc prit des vêtements pour une semaine, mais ses affaires avaient du retard et il n’avait quasiment plus rien à se mettre. Or même en faisant une lessive maintenant ou demain, il lui manquerait des habits... Il ne restait donc plus qu’une solution : allez acheter de quoi tenir au maximum trois jours, car il ne savait vraiment pas quand est-ce que ses autres affaires arriveront à bon port.

Il s’empara de la dernière robe encore propre qui lui restait, enfila le tissu blanc crème, choisit des chaussettes montantes jaunes canari, ainsi qu’un petit gilet de la même couleur. Une fois ses chaussures lolita blanche à ses pieds, Asahi attrapa son tas de vêtements sales et descendit avec pour les mettre en machine. Il programma l’appareil et le lança. Lorsque la machine se mit en route, il quitta son poste d’observation, remonta rapidement dans sa chambre, prit ses affaires, soit porte-monnaie, carte bleue et cartes fidélités. Il essaya de mettre un peu ses cheveux en place à grands coups de brosses et finalement partit après avoir bataillé sans succès.

Le centre commercial n’était pas très loin et le jeune homme aux allures de filles décida d’y aller à pieds. Beaucoup préfèrerait sans doute prendre le métro ou y aller en voiture, mais Asahi préférait de loin marcher, ce n’était pas un garçon pour rien ! Il arriva à destination une vingtaine de minutes plus tard. Le bâtiment faisait facilement cinq étages, avec plus de trois mètres de plafond pour chaque étage. Une partie du toit était en verre, créant un puits de lumière au centre de l’ensemble des magasins.

Asahi resta un moment à regarder le spectacle qui s’offrait à lui, c’était la première fois qu’il visitait un endroit aussi grand, il en était tout retourné. Il se dirigea vers l’un des plans du centre commercial et chercha quelques magasins de vêtements qu’il connaissait. Au total, il n’en trouva que deux... Il allait devoir visiter les autres pour diversifier ses possibilités d’achats. Il se mit en route, un petit sourire bien content sur le visage. Il passa près de trois heures dans les rayons de presque tous les magasins qui lui semblait à la porté de son argent de poche, mais n’achetant rien. A vrai dire, il n’avait rien trouvé à son goût...

Il allait peut-être rentrer et rester en pyjama demain ? Selon les dires de la météo, demain serait une journée ensoleillée et qui se réchaufferait beaucoup dans l’après-midi. Et bien il n’allait pas avoir d’autres choix que de passer cette magnifique journée enfermée dans sa chambre sans pouvoir en sortir... Ce serait vraiment dommage... Il alla de nouveau jeter un petit coup d’œil à l’une des cartes du centre commercial. Il ne restait à Asahi qu’un magasin qu’il n’avait pas encore fait. Sa dernière chance.

Il choisit cependant de faire tout d’abord une petite pause, histoire de reprendre courage, dans un petit café du bâtiment. Il commanda un chocolat chaud ainsi qu’un mille-feuille. Il sirota lentement le liquide brun, faisant attention à ne pas se faire une jolie moustache de chocolat, puis il allait planter sa cuillère en plastique dans la pâtisserie, quand un cauchemar se faufila près de lui :

« Ah ! Mais ça ne serait pas Asahi ? »

Le jeune homme au visage androgyne redressa la tête pour se retrouver face à l’une des pestes de sa classe, jalouse de lui, qui avait pour dernier passe-temps de l’embêter. Et elle n’était pas seul : il y a avait deux autres filles du même groupe, ainsi que trois garçons avec elles. Soit leurs petits-copains, soit des garçons qu’elles avaient indirectement harponnés dans le centre commercial en les draguant. Asahi fut un petit peu jaloux sur le coup, car si la première hypothèse était la bonne, alors ça voulait dire que des pestes pouvaient avoir des petits-amis et que lui il n’en n’avait pas, alors qu’il était beaucoup plus gentil que ses filles.

« Qu’est ce que je peux faire pour toi ? »

Le ton était poli, sans être amical. Sa voix fluette qui faisait tant penser à une fille avait été une fois de plus calme. Maintenant il connaissait assez ses filles pour ne plus être dans tous ses états à cause de sa timidité maladive. Néanmoins, avec elles, il ne serait pas quelqu’un de gentil, serviable et amical.

« Toi ?! » Lança la fille dédaigneusement, en toisant Asahi de haut en bas. « Rien, tu faisais juste pitié dans ton coin, assise toute seule dans cet accoutrement de poussin. »

Accoutrement de poussin ? Juste parce qu’il portait un gilet et des chaussettes montantes jaune canari ? Et bien, la pauvre fille ne devait pas avoir beaucoup d’imagination. Asahi serait presqu’en train de la plaindre. Mais il devait avouer qu’à côté d’elles, il n’avait rien de spécial... Etant un garçon, on pouvait déjà faire une croix sur la poitrine, alors que ses vis-à-vis affichaient des bonnets D ou C. Quand à la question des habits, elles avaient dut dépenser toutes leurs économies pour s’acheter ses vêtements de marques, alors que lui, il n’était pas trop ce genre "d’acheteuse" : il se contentait de choses simples, tout en harmonisant le tout.

« Je te remercie de ta sollicitude, maintenant si tu le permet, je vais vous laisser. J’ai d’autres choses à faire que piapiater avec le genre de fille que tu es. »

La seule fille qui lui avait parlé n’eut même pas le temps de répliquer à cet outrage qu’Asahi se levait déjà, sa pâtisserie en main et allait demander la note, ainsi qu’un paquet pour son gâteau. Le jeune travesti ne resta pas plus longtemps dans le café avec ses trois filles dans les parages. Il se rendit ensuite au dernier magasin qu’il avait choisit de visiter, et miracle, il trouva enfin des habits à ses goûts ! C’était peut-être sa récompense après ce qu’il s’était passé avec les pestes, comme quoi elles n’étaient pas si inutiles que ça.

Il prit une robe bleue ciel, un haut court croisé blanc, un jupon flashy bleu clair, ainsi qu’un shorty jean et se rendit en cabine. Il essaya la robe tout d’abord et tourna sur lui-même. Au vu de la taille, il allait devoir mettre des collants avec, mais sinon, elle lui plaisait bien. Il changea ensuite de tenue pour le haut blanc et le jupon. Pour celui-là, l’ensemble était moyen. Le jupon n’allait pas avec le haut, mais il avait dans ses valises quelque chose qui irait parfaitement avec. Il décida donc de le prendre et s’empara du shorty. Le haut et le bas était tout les deux très court, peut-être même un peu trop... Mais avec des collants et des bottes montantes, le tout rendrait peut-être mieux, même si ça ferrait alors un peu rock’n’roll.

Alors adjugé-vendu pour ses articles. Par contre, il repartit rapidement en rayon pour choisir deux couleurs de plus à son haut croisé : rouge et bleu marine. Il passa en caisse et repartit du magasin, bien content de tous ses achats. Il n’avait plus qu’à rentrer, finir son mille-feuille, ranger ses nouveaux achats et s’occuper de sa machine.

Pourtant, lorsqu’il sortit du centre commercial, une mauvaise surprise l’attendait : les trois pestes l’attendaient de pieds fermes et il n’y avait plus les garçons avec elles. Cela signifiait qu’il s’agissait d’un règlement de compte "entre filles". Asahi se fit piéger plus loin et les pestes commencèrent par des attaques verbales, comme quoi "elle" se prenait pour le centre de la terre alors "qu’elle" n’était rien. "Qu’elle" ferait mieux de partir et de les laisser tranquille au lieu de jouer à la pute et de se coller aux garçons.

Puis vint les coups. Enfin, les coups, se sont surtout des gifles en fait. Asahi ne répliquait rien, il savait que de toute manière, ça ne changerait rien et ça ne pourrait en effet qu’aggraver son cas. Il se contentait donc de ne pas broncher, ne réagissant que lorsque l’une des gifles finie en griffures sur sa joue à cause des ongles de ses agresseurs.

Asahi continuait de se prendre des claques sans répliquer. S’il avait fait quelque chose contre ses trois pestes, elles seraient sûrement aller courir vers l’adulte le plus proche en disant que je les maltraitais. En bon adulte naïf, ce dernier l’aurait emmené à la sécurité du centre commercial et on l’aurait questionné. Les filles en auraient profitées pour s’enfuir et lui se ferait sermonné sans raison, avant que les adultes ne se rendent compte qu’il n’avait rien fait du tout. C’était une sorte de scénario clichée, mais c’était aussi une triste vérité qu’on ne pouvait changer. Les adultes croyaient toujours les premiers qui venaient se plaindre à eux, sans vraiment réfléchir, car il existe toutes sortes de personnes dans ce vaste monde.

Du sang coulait sur sa joue. Du sang provenant de la blessure que la peste en chef lui avait faite, en la giflant, à cause de ses longs faux ongles vernis dans une couleur flashy et tout à fait immonde. Il sentait les perles de sang rouler une à une sur sa joue pâle. Enfin, ce n’était pas grand-chose, il avait déjà saigné plus que ça. Mais il s’imaginait très bien que ces perles rouges qui lui faisaient une sorte de larme rouge. Ça devait être beau à voir. En tous cas assez pour que les pestes pour arrêter de la baffer et la regarde avec supériorité. Asahi ne disait rien, il ne les regardait même pas, fixant un point invisible très loin derrière elle. Voyant qu’il ne réagissait pas, le peste qui servait de leader, une garce blonde de plus dans ce bas monde, leva une fois de plus la main, avec l’intention sûrement de lui mettre une claque qui serait sensé le faire réagir.

« Si je puis me permettre, ce n'est pas en faisant ça que vous allez lui faire bien mal, non ? Utilisez plutôt ça. »

Asahi porta son regard vairon sur la nouvelle venue. Une autre peste amie avec les autres ? Non, elle n’avait pas le même style. Et puis, elle n’était pas dans leur classe, or la blonde était le genre de personne à s’entourer que de larbins qu’elle pouvait contrôler 24h/24. Elle avait des cheveux verts dont la fragrance colorée ressemblait beaucoup à l’œil gauche vert d’Asahi. D’ailleurs, les yeux de la jeune fille étaient verts également. Et elle était principalement habillée de violet, dans un ensemble à la fois assez masculin mais très féminin aussi. Quand à ses mains... Elles tenaient un couteau...

Plastique ou Fer ? Asahi n’était pas assez expert pour devenir de quoi il en retournait à cette distance. Mais par contre, il était assez connaisseur pour savoir que ça faisait en effet vraiment mal... En tous cas, la verte affichait un drôle de sourire à faire froid dans le dos. Quoique... Asahi avait déjà eut le loisir de voir un véritable sourire dément et il fallait dire que celui de la nouvelle venue semblait plutôt du genre, faux. Mais tout de même effrayant.

« Avec ça, on peut bien faire mal. Ça s'utilise très bien. Ça vous plairait de savoir pourquoi j'utilise un couteau ? Les flingues c'est trop rapide. Ça t'empêche de savourer toutes ces petites… émotions. »

On pourrait presque la prendre pour une folle en l’écoutant parler ainsi... Mais Asahi aimait les romans d’horreur, donc ça ne lui faisait pas particulièrement peur. Ce qui suivit était l’action parfaitement clichée du tueur en série, se préparant à sentir de goût du sang dans sa bouche. En voyant cela, Asahi ne put s’empêcher de sentir un sourire amusé étirer ses lèvres vers le haut, avant même que la blondasse et ses deux copines ne s’enfuient, leurs jambes au cou. Le jeune homme à robe regarda les filles disparaitre au loin et il lança un sourire complice et amusé à la jeune fille aux cheveux verts.

Soudain, il se rendit compte que la fille devant lui était une parfaite inconnue, qu’il ne savait rien d’elle, pas même son nom ou son prénom, ni pourquoi elle était intervenue. Et lui, il s’était mis à sourire bêtement à cette personne qu’il ne connaissait pas le moins du monde. Le rouge s’empara de tout son visage, sous l’immense gêne qu’il ressentait, alors qu’il n’avait pas à se sentir gêné soit dit en passant. Bientôt, le rouge contrasta avec ses yeux hétérochrome et même ses oreilles avaient virées au cramoisie.

Il s’inclina respectueusement devant l’inconnu, de plus en plus gêné, sentant qu’il allait faire une bêtise d’un moment à l’autre. Il se redressa, n’osant même pas regarder celle qui avait abrégée ses "souffrances", qui ne l’avaient pas tellement fait souffrir. Le sang coulait toujours de sa blessure, mais il l’avait complètement oublié, sa gêne et sa timidité maladive étant beaucoup plus forte.

« Je... Je te remercie pour ton geste !! » S’écria presque Asahi à l’intention de la jeune fille aux cheveux verts.

Il n’avait plus rien à voir avec la personne qu’il était avec les trois pestes, il y a à peine une minute. Le "lui" calme et posé avait laissé place à son "lui" gêné et timide avec les inconnus, ne sachant pas quoi faire, ni comment quoi dire, sans faire un pas de côté. Son regard vairon capta cependant l’image du couteau et il se redressa, faisant face à son interlocutrice. Sa voix fluette et hésitante retentie de nouveau, un peu plus posée, mais toujours aussi gênée.

« Euh... Tu devrais faire attention quand même avec ce couteau. Ça peut faire beaucoup de dégâts. »

Il lui fit un petit sourire, timide celui-là aussi. Mais les dégâts dont il parlait n’avaient rien d’innocents en tous cas. Il en gardait encore la marque indélébile sur son corps. Il s’approcha de son interlocutrice aux cheveux si spéciaux, mais quand on parlait de quelque chose de "spécial", il n’était pas mieux, bah oui quoi, il était un garçon, chétif et androgyne certes, mais un garçon tout de même, et il portait en ce moment une robe... Et ce n’était qu’une simple illustration de sa façon de s’habiller quotidiennement.

« C’est quoi ton nom ? Je n’ai pas l’impression de bien te remercier en ne connaissant pas ton nom. Désolé si c’est trop indiscret... Ah et moi c’est Asahi. »

Et dire qu’il faisait facilement dix centimètres de plus qu’elle... Et qu’il n’arrivait pas à arrêter de rougir de gêne et de timidité. S’en était presque ridicule à ce point-là. En plus il n’arrêtait pas de sourire comme un idiot. Il savait pourtant que c’était ça qui faisait que les autres filles le détestaient et que les garçons voulaient coucher avec lui... Mais il n’y pouvait rien, c’était dans sa nature d’être timide et gêné à ce point lorsqu’il parlait avec un inconnu. Rien ne pourrait changer cela et il le savait malheureusement que trop bien. Asahi était aussi très naïf, qu’est ce qui lui disait que la fille en face de lui n’avait pas été sérieuse dans ce qu’elle avait dit aux autres pestes tout à l’heure. Mais rien que cette simple idée était chassée par son esprit excessivement naïf.