Sujet: ερμαφρόδιτος. ☿ ▬ Emille Avery Winter. Mar 20 Nov - 22:22 Invité Emille Avery Winter.
" boy will be boys , hiding in estrogen & wearing aubergine dreams ."
ÂGE : 25 ans. NATIONALITÉ : Grecque. Et britannique. Mais grecque. SITUATION AMOUREUSE : Célibataire. ORIENTATION SEXUELLE : Bisexuel. STATUT : Professeur d'arts.
Branches. N'a pas confiance en lui ; ne fait pas confiance aux autres ; envieux sur les côtés ; attentif ; patient ; possessif, mais le tait ; maladroit ; créatif ; taquine les personnes qu'il apprécie ; parle peu de lui et il lui arrive de mentir sur son enfance ; ne s'énerve que rarement ; apprécie l'humour cynique et la répartie (bien que lui n'en n'ait que très peu) ; parle parfois de lui au féminin.
Leaves. Grand ; mince ; très pâle ; yeux noisettes ; cheveux courts brun foncé, presque noirs ; apprécie les vêtements simples ; intersexué ; fossettes ; visage androgyne ; délicat ; imberbe ; effeminé.
Roots. Je n'ai pas toujours envié les autres. C'est vrai. Mais je n'ai pas toujours été conscient de ce qui me différenciait d'eux. Disons qu'au contraire de ce certaines personnes peuvent penser, j'ai vécu une jeune enfance semblable à celle de tous les autres gamins : j'étais une fille réservée et timide qu'on appréciait malgré tout. On me parlait, on jouait, on riait avec moi, puis on m'oubliait. C'est peut-être triste, mais ça me convenait. J'étais normale. Aux yeux des autres, du moins, je l'étais. Les gens ont beau vouloir être différents et uniques à tout prix – être illuminés d'une magnificence infinie –, la normalité est une chose à laquelle on se raccroche désespérément : nous avons tous besoin de la compagnie d'autrui et nous vivons tous mal le rejet. Appelez ça l'orgueil, appelez ça la dépendance affective ou la fragilité, cette recherche d'affiliation avec la société est patente. Moi, je ne le nierai pas. J'aimais être normale. Toutefois, lorsqu'ils me voyaient m'amuser allègrement dans la boue avec d'autres garçons, qu'ils m'apercevaient me battre avec eux, ou encore qu'ils remarquaient mon intérêt particulier pour les vêtements masculins, il arrivait que mes parents me regardent avec regret, comme si j'allais bientôt passer à la guillotine. Non, non. C'était pire que ça. Comme si eux m'avaient inopinément envoyé à la guillotine. J'étais très jeune à l'époque, alors peut-être que c'était ma singulière imagination qui me jouait des tours – ça n'aura pas été la dernière fois –, mais je sais qu'il est très probable que ces regards navrés aient bel et bien existé. Mes parents étaient des gens biens. Ils le sont encore, d'ailleurs, j'ai seulement moins l'occasion de les voir. Catherine Zacharias (Αικατερίνη) est une Grecque de souche. Avant de rencontrer mon père, elle vivait seule en appartement à Athènes, après avoir quitté la vie rurale pour devenir une riche femme d'affaires dans le domaine de la mode. Un domaine dans lequel – je dois dire – elle excelle. Aaron Winter, quant à lui, est un peintre abstrait Anglais – peu connu – qui vivait avec des amis à Londres. J'ai toujours pensé que ses œuvres, inspirées du fauvisme, étaient magnifiques et qu'elles méritaient bien plus d'attention qu'elles n'en obtenaient : il avait toujours eu peine et misère à payer son logement car il ne vendait pas suffisamment. C'est pourquoi il avait un travail de côté au salaire minimum. Quoi qu'il en soit, l'année 1993, il décida de prendre des vacances; le 10 janvier, il part en direction de la Grèce, pays qu'il a toujours eu envie de visiter depuis sa plus tendre enfance, depuis que son grand-père explorateur – d'origine japonaise et aujourd'hui décédé – lui avait montré son album de photographies. C'est dans un bar quelconque du centre-ville qu'il rencontre ma mère et qu'il en tombe éperdument amoureux. Suite à une série de péripéties fascinantes (notamment avec le père de Catherine) que je m'abstiendrai de décrire, il décidera de quitter son travail et de s'installer à Athènes avec elle. Presque trois ans plus tard, je vois enfin le jour. Je ne sais pas s'ils savaient ce qui les attendait lorsque je suis né. Peut-être. Je n'ai jamais osé regarder le dossier médical – je ne sais même pas si je peux y avoir accès – et je n'ai jamais osé leur poser la question non plus. Tout ce que je sais, c'est qu'à ma naissance, je n'étais ni un garçon ni une fille. Et que dans la société moderne, ce genre de choses pose un problème équivoque. Il n'y a qu'à prendre les exemples les plus simples au monde : les toilettes – homme ou femme – les vestiaires – homme ou femme – les papiers d'identification – F ou M – ou encore la sexualité – homme/femme, homme/homme, femme/femme –. Notre sexe nous permet de s'identifier et d'être reconnu en tant qu'individu, au même titre qu'un prénom ou un âge. Si nous n'en n'avons pas, qui sommes-nous aux yeux de l'Autre ? Je ne suis rien. Je suis un défaut dans un système de tri des genres, alors je me dois de me plier à un sexe ou à un autre. Je suis un hermaphrodite grec. Un Grec hermaphrodite. L'ironie mon intersexualité me donne encore envie de pleurer. ●●● Il est évident qu'un sexe disgracié ne se guérit pas en un clin d'oeil. S'il est possible de parler de guérison et non de réparation (de mutilation ?) dans ces cas-là. Il faut les moyens : il y a des médicaments à prendre, des opérations à effectuer, des rituels quotidiens à ne surtout pas oublier, sans compter qu'il faut sortir du pays car ces interventions ne se font pas en Grèce. Ça coûte les yeux de la tête. Ma mère avait un revenu élevé, certes, mais mon père, lui, avait beaucoup moins d'argent à offrir, même s'il s'en voulait énormément pour ça. Alors je suis resté le même. Cependant, puisqu'il me fallait m'intégrer avec les autres, mes parents ont dû faire un choix. Ils décidé de m'élever comme une jeune fille, décision qu'ils ont éventuellement regretté. Apparemment, j'ai toujours eu un côté masculin plus prononcé que féminin. À l'école, on gardait mon intersexualité secrète. Aucun de mes camarades de classe ne se doutait de quoi que ce soit. Aucun parent non plus. Il y avait seulement quelques rares personnes, dont la directrice de l'école, deux ou trois professeurs, la travailleuse sociale, la psychologue et autres, qui étaient au courant de la situation. Il ne fallait pas que ça s'ébruite, car Dieu sait (non pas que je sois croyant, loin de là) ô combien les préjugés peuvent être fatales; les gens vous regardent de haut, vous traitent comme un déchet, vous ignorent comme si vous étiez un mur. À l'époque, je ne saisissais pas ce genre de concept humain; je ne comprenais donc pas tout à fait pourquoi il fallait à tout prix que je garde mon corps loin des yeux curieux des autres (il faut dire aussi que je n'étais pas tout à fait en connaissance de cause et que pour moi, mon corps était parfaitement normal) mais maintenant, je suis prêt à tout pour garder ça secret. J'essaie souvent de visualiser les regards des autres s'ils savaient ce que je suis. J'imagine toujours le pire : le dégoût, l'amusement, la haine, la peur. Dans tous les cas, ça m'horrifie. C'est à 10 ans que j'ai compris que j'étais un monstre. Nos voisins d'en face avaient un enfant loufoque qui se trouvait être un de mes camarades de classe - à qui je n'ai jamais vraiment parlé - : je le voyais souvent faire des grimaces aux passants dans la rue. Parfois je le voyais sortir avec des tonnes de fruits sous les bras pour en faire une sculpture chimérique qui ne ressemblait à rien. Ou encore, il lui arrivait de s'étaler par terre, dans le gazon, puis de rester immobile comme une vulgaire masse atonique pendant plusieurs heures; lorsque sa mère le retrouvait enfin, les cheveux en bataille, ce n'était qu'avec une mine exaspérée et exténuée. Je savais que la terrible habitude de ses scènes infantiles lui pompait l'énergie jusqu'au bout des doigts parce que ça se voyait. C'était vraiment un étrange garçon, mais plus étrange encore était son prénom. Il s'appelait Lucide. Absurde Lucide. Lucide, l'absurde. Ce contraste lui seyait terriblement bien par son originalité. C'est grâce... non, c'est de sa faute si j'ai perdu chaque once de certitude que j'avais sur mon existence. Ç'aurait pu être la faute de n'importe qui, puisque j'étais destiné à le découvrir un jour ou l'autre, mais c'est tombé sur lui et je le hais pour ça. Je peux facilement dire que la façon dont ça s'est passée est ridicule. Lucide était entré dans mon jardin (ce genre d'envie lui prenait, parfois, et dès que Catherine le voyait, elle le ramenait en face où la mère de l'enfant se confondait en excuses) et m'avait vu par la porte-fenêtre, au moment même où je sortais de la salle de bain. Bien sûr, j'aurais pu sortir couverte, mais j'étais une enfant. Les enfants sont stupides, ignorants et immatures. Ça m'amusait de me promener nue comme un ver dans la maison; jeu auquel je ne me suis plus jamais abandonné par la suite. Inutile de dire que le lendemain, ses parents savaient et que la semaine d'après, toute l'école aussi. Inutile, mais je le dis tout de même. Après tout, je suis un paradoxe ambulant. Comme tous les enfants de mon âge, j'avais eu mes rêves. J'avais rêvé de me marier, d'avoir des enfants, de devenir riche. J'avais rêvé d'acheter une gigantesque maison, d'avoir un chien, de conduire une voiture à toit ouvert. J'avais rêvé de tout et de rien. Puis j'ai compris. Je n'aurais pas de femme, ni de mari, ni d'enfant. Je n'aurais pas de famille. Je n'aurais pas non plus une énorme maison, ni une voiture à toit ouvert. Mon rêve utopique s'effondrait en soulevant la poussière. Je crois que la période qui suivit cet événement fut la plus désagréable de toute ma vie. Je ne m'en souviens que très vaguement. Se forcer à oublier est chose courante pour les gens qui vivent des traumatismes et je venais d'en vivre un énorme : j'apprenais que j'étais une anomalie et cette découverte venait main dans la main avec un rejet instantané de mon entourage. Isolement, solitude, dégoût, colère. J'étais comparable à une maladie contagieuse mortelle, comme la peste ou la grippe espagnole. Le moindre contact avec moi et c'était la pandémie. Peut-être que vous pensez que j'exagère (et ce serait tout à fait compréhensible) mais eux aussi exagéraient. Les vestiaires m'étaient interdits. On me parlait avec réticence. On me dévisageait fréquemment. Je laissais un sillon de murmures derrière moi. J'avais un terrible besoin de m'estomper et d'être invisible, mais leurs yeux me traquaient comme une difformité et me rappelaient sans cesse la misère de mon physique. Ils exhumaient ma dépouille atrophiée, la disséquaient et la mystifiaient à travers leur regards et leur réalité parfaite. Mes paupières sont vite devenues un bref échappatoire qui m'engouffrait dans un néant apaisant, démesuré, un éther parfait qui esquintait provisoirement mes sens et mon corps. Une pause temporaire et temporelle. J'étais, toutefois, à chaque fois confrontée au même obstacle : je ne faisais qu'entrevoir cette porte de sortie et ils étaient de nouveaux là, ces douloureux stigmates encastrés dans mes yeux. « Alors, c'toi qu'as un zizi? » Une pause temporaire et temporelle. ●●● Mes parents me portaient un amour inconditionnel : ils m'adoraient et m'auraient adoré même si j'étais né avec trois bras, une jambe et des ailes. Ils savaient que de rester à cette école ne me ferait que souffrir davantage. C'est pourquoi, suite à maintes réflexions, nous avons déménagé dans la ville natale de mon grand-père, le plus loin possible de mon cauchemar chronique. Ma mère et moi connaissions un peu la langue, puisqu'Aaron nous l'avait apprise, alors l'intégration ne fut pas si difficile. J'ai profité de la transition pour devenir un garçon ; j'avais besoin de me sentir différent. Mais ce n'est pas comme si fuir était une solution. La douleur psychique était toujours là. Si je n'avais pas eu peur de la douleur physique, je me serais probablement amputé l'entrejambe. Je n'en voulais pas, de cet abcès pervers, et je n'aurais certainement pas demandé une telle gracieuseté , si j'avais eu le choix. ●●● Le reste de ma vie a été plutôt banale. Ma vie amoureuse était un échec (j'ai eu deux ou trois copins/copines qui m'ont laissé parce que c'était « trop difficile à avaler », quel jeu de mots puérile), mais j'ai réussi une carrière en tant que professeur d'arts plastiques dans un pensionnat. Les arts étaient, par leur liberté d'expression, le métier parfait pour moi.
Toi, là, derrière l'écran !
" they stare at me while i crave you. "
ÂGE : 15 millions d'années. PRÉNOM / PSEUDO : Tortue. SEXE : Escargot. COMMENT AS-TU CONNU LE FORUM ? Topsite. PRÉSENCE : Fréquente. AUTRE CHOSE ? Crocodile. CODE DU REGLEMENT : Validé by Akito.
Dernière édition par Akito Ogawa le Lun 26 Nov - 21:33, édité 7 fois (Raison : Code)