Pas un bruit ne régnait dans la grande pièce. Un calme absolu que tous les occupants du lieu s'assuraient de conserver, tel une loi inaltérable. Une communauté en parfaite harmonie.
Ses professeurs disait toujours d'elle qu'elle était trop superficielle dans ses rédactions et que l'on n'avait pas l'impression qu'elle y prenait du plaisir. Étrange pour une élève qui passait le plus clair de son temps à la bibliothèque. Mais ils ne se sont jamais dit que c'était peut-être justement le cas.
Non, Kureha n'avait pas une fascination pour la lecture et encore moins pour l'écriture. Il était même rare qu'on la voie ne serait-ce que feuilleter un livre dans l'immense choix qu'offrait la bibliothèque de l'école où elle se rendait chaque jour. Elle n'y venait pas pour faire ses devoirs non plus ou alors très rarement. Et ce n'était pas pour y rencontrer quelqu'un car elle était toujours seule.
Non, rien de tout cela.
Lorsqu'elle allait dans la bibliothèque, Kureha se contentait seulement de profiter du calme qui y régnait. Sûrement le seul endroit au monde où l'on pouvait regrouper des dizaines de personnes sans que cela ne tourne en cacophonie.
Le silence. Voir même lé néant auditif. Voilà ce que recherchait Kureha dans cet endroit. Car c'était une fille qui aimait le calme, voilà tout.
La bibliothèque était pour elle un exutoire, un moyen de mettre de côté toutes les pensées négatives qu'elle avait pu accumuler dans la journée. Un court instant où elle pouvait souffler et se sentir totalement sereine, en osmose avec ce qui l'entoure.
Un havre de paix en somme.
C'est comme cela qu'elle s'était retrouvée, dès le premier jour, dans la bibliothèque de l'établissement. Elle n'avait fait qu'un pas à l'intérieur mais elle savait déjà que ce serait son nouveau foyer de substitution.
La voici donc au seuil de la porte, à scruter les étagères parfaitement rangées, les élèves s'adonnant à diverses activités autour des grandes tables en bois, la bibliothécaire en train de mettre à jour les rendus des livres sur l'ordinateur, et d'autres qui, comme elle, étaient là pour flâner un peu.
Elle resta là pendant un long moment, écoutant les seuls parasites sonores environnant. Une page qui se tourne, des pas qui résonnent dans les allées, un crayon qui gratte sur le papier. Du bruit? Non. Simplement des sons familiers, ceux qu'elle avait toujours entendu dans toutes les bibliothèques où elle avait pu se rendre et qui se marient parfaitement à l'atmosphère du lieu. Sûrement les seuls nuisances qu'elle pouvait supporter sans mal, loin du bourdonnement criard de la sonnerie de l'école ou du vacarme produits par les élèves dans les couloirs.
Elle avait fermé les yeux sans même s'en rendre compte pour mieux écouter. C'est en les rouvrant qu'elle vit le visage interrogateur de la bibliothécaire. Un peu gênée, elle se décida alors à fouler définitivement le sol de la grande pièce.
Elle voulait tout découvrir de ce nouveau lieu afin de se l'approprier tout entier. Aussi, elle se dirigea vers les premières étagères à gauche et commença à faire le tour des allées, d'un pas nonchalant, un sourire discret au bout des lèvres.
Elle vagabondait partout depuis déjà cinq minutes mais elle n'avait même pas fait le tier du chemin. Elle préférait prendre son temps malgré l'impatience qui montait à chaque pas. Elle continuait son petit bonhomme de chemin, d'allée en allée et là, ce fut le retour au vacarme de la réalité.
!! BADABOUM !!
Des bouquins venaient de tomber face contre terre, dans un fracas assourdissant pour Kureha, dans un claquement sourd qui arrive plus souvent qu'on ne le croit pour les autres.
La personne responsable de ce viol auditif? une jeune fille inconnue que Kureha venait déjà de maudire sur plusieurs générations dans son esprit. Néanmoins elle se contenta juste de lui jeter un regard las, attendant de voir comment la fille allait bien pouvoir réparer sa faute.