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[Juste pour prévenir... Je risque de faire plus court dans l'avenir.
Les premiers postes sont toujours longs par rapport aux autres. ^^']

"Est-ce trop te demander que de ne pas laisser ton visage se faire abîmer ?"

Ichigo soupira, assis près de moi. Il massait sa tempe, geste habituel, manie que j'ai su sans le vouloir, copier. Il n'osait pas me regarder, moi et mon oeil un peu gonflé. Je ne relevais pas les yeux du sol, je ne répondais pas à sa remarque. Ichigo n'a jamais su m'engueuler ou me frapper, quand l'idée germait dans sa tête, le doute l'assaillait ; oserait-il lever la main sur un enfant qui n'était peut-être pas le sien ? Serait-il capable de le faire sans éprouve un seul remord ? Peut-être qu'une simple correction de sa part aurait pu changer le cours de mon existence.

Le cynisme anima mes yeux, sans que je ne prononça un seul mot. Après tout, qu'avais-je à dire pour ma défense ? Je n'ai pas cherché les coups, et c'était certainement cet acte qui fût pris pour du dédain à l'égard de ces gosses de la nature, qui m'a foutu dans cette situation. Voilà où j'en suis ; assis dans un fauteuil, un cocard à l'oeil et un père  sortant tout droit d'un défilé assis prés de moi. Pourquoi es-tu là, Ichigo ? Pourquoi ne fais-tu pas comme d'habitude ; envoyer ton agent à ma rencontre ? C'est presque dérangeant, de t'avoir à mes côtés...Assis là, aussi décontracté que moi, tu attirais le regard, mannequin professionnel, taillé pour les magazines, toujours occupé, toujours beau...Ça se voit que personne à part moi et maman ne t'ont vu au sorti du lit, aussi aimable qu'un ours.

"Je vais te laisser avec Tyler, il va s'occuper de toi, faut que j'y aille. Discute avec lui de ton premier boulot s'il te plaît ! Je t'ai trouvé un casting pour la pochette du prochain single d'un groupe de musique japonais."

"Et si je ne veux pas ?"

Ce père resta silencieux, immobile et sur ses gardes, plongeant ses yeux dorés dans les miens glacés, en recherche qui sait, d'un doute, d'une réponse. Oui, Ichigo, et si je ne veux pas devenir comme toi ? Et si je ne souhaitais pas avancer ? Je fais du surplace, je regarde les autres passer sans avoir le courage de regarder vers l'horizon, de faire de même. Pourtant, je  sais que je le peux, que je ne suis pas une cause perdue, qu'il me reste quelque chose. Mais quoi ? Oui, quoi ? J'ai étiré un sourire hypocrite signifiant un "j'déconne", il me rendit cette esquisse, un peu forcée, doutant encore de mon humour noir.

Ichigo a disparu, du coin de l'oeil j'ai observé son agent trottiner dans la cour, s'avançant vers moi. J'entendais déjà sa voix aigrie par les années me faire la morale et me dire comme quoi ce "métier" est éphèmere. Ai-je seulement demandé de l'exercer ? Je ne sais rien faire de mes mains, si ce n'est blesser. Ma mèche habituelle tomba sur mon cocard quand j'ai finalement baissé le regard, la mine impassible. Je n'avais pas envie d'entendre Tyler piailler, pas le moins du monde. 

Mes iris s'animèrent et se posèrent sur un jeune inconnu, d'à peu près mon âge et qui, vu sa manière d'agir, venait d'arriver. Je ne pouvais pas encore réellement le détailler, mais il semblait pour mon grand amusement et mes étranges goûts, tout à fait original. Au moment où je me suis levé pour commencer à m'approcher d'une démarche dégingandée jusqu'à l'inconnu, Tyler arriva, ayant tout de suite remarqué mon petit jeu pour l'éviter.

"Namun, reviens ici tout de suite !" 

A la hauteur du jeune homme, j'ai complètement ignoré le jappement de l'agent agacé. Mon regard observa le plan, et de deux doigts avisés je l'ai retourné pour le mettre à l'endroit.

"Namun, je vais le dire à ton père. Arrête de draguer, merde !"

Je ne me suis pas retourné le moins du monde après cette remarque, et finis par entendre ses petites talonnettes claquer, preuve qu'il était parti. Mon oeil voilé d'absence et légèrement étincelant revint à celui du jeune homme, pour le moins excentrique et charmant. Ses cheveux étaient d'une drôle couleur, en fait, tout semblait le définir comme un être à part. Un sourire imperceptible étira mes lèvres, et ma voix se fit chuchotis, toujours aussi monotone. J'aurais pu tenter d'être sympathique, mais cela aurait servi à quoi ? A montrer mon hypocrisie, encore une fois. Autant être soi-même dans ce cas.

"Besoin d'aide ? T'as l'air perdu alors bon..."

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[Ta réponse est très bien, ne t'en fais pas.]

Je ne pensais pas les japonais aussi délurés que les américains que j'avais cotoyé, voir même plus encore. Ou alors, était-il un cas à part ? Certainement, vu sa façon de se comporter. Oh, je n'avais rien contre le fait qu'il soit énergique et autre chose, pourtant, plus je l'observais et plus je le trouvais...intéressant ? Je n'ai pas le mot exact pour définir cette impression, mais ce que je sais, c'est qu'il était mon opposé. Tout ne semblait que couleur et vivacité ; il souriait, il bougeait, il parlait, il vivait. D'une telle manière que tous mes regards quelque peu intrigués par cette beauté non-universelle se posaient sur lui. 

Le mien ne faisait pas exception à la règle. Mes iris glacées fixaient les siens d'un étrange et profond magenta. Ses yeux étaient-ils naturels ? Pourquoi cette couleur me rappelait-elle un souvenir ? Une mémoire voilée, à peine utilisée, un coffre sans serrure, rouillé et enfoui quelque part dans mon inconscient. Cette couleur m'intriguait et me blessait dans un ensemble étouffant, irrespirable. Oui, j'avais l'impression que l'on m'étranglait, que quelqu'un fouillait mon esprit sans se soucier de la douleur qu'il causait à mon corps secoué de soubresauts. Dis-moi, toi, toi dont le nom ne m'apparait pas, pourquoi vois-je en toi un autre regret que je tente tant et plus d'anéantir ? 

J'ai étiré un sourire plus que cynique, penchant la tête de côté. Oh, je ne me moquais pas le moins du monde de ses agissements et de ses paroles. Je riais de ma pensée, de mon futile esprit, de mes questions sans sens, de mon idiotie à ne pas voir au-delà le mur qui m'encercle. Je ricanais en mon for intérieur de ma noirceur, de ma folie et de mes remords, tellement sans importance comparés aux autres. Je devrais arrêter de penser ainsi, je devrais arrêter de rester immobile. J'en suis capable, mais ma putain de volonté n'y est pas. Disparue, peut-être même décédée. J'ai l'impression que la réalité n'est qu'un rêve, et que le songe est plus vif que jamais.

L'œil magenta finit par garder le silence, attendant certainement une réponse. Mes yeux restaient accrochés à la porte qu'il venait de fermer. On aurait dit qu'il n'aimait pas Tyler, remarque l'appréciais-je moi-même ? Cela faisait déjà quelques années que l'agent suivait mon père, lui trouvait du boulot, était son porte-parole, son organisateur, son...couteau-suisse quoi. Même lorsque je fus en maison de correction, il était là, à la place d'Ichigo, derrière la vitre, au téléphone, aux funérailles...

Sans m'en appercevoir, je m'étais rapproché de ma démarche silencieuse de mon interlocuteur. "Sauveur", haha. Ce mot me semblait plus que caustique ; sauveur. Je n'avais jamais sauvé quelqu'un, et quand je le souhaitais plus que tout au monde, j'arrivais toujours à l'effet contraire. Mes mains ne sauvent pas, elles étranglent ; je ne sais rien faire d'autre de ces paumes que tuer. J'ai fermé les yeux, me concentrant sur sa dernière question, répondant au plus simple, pour mieux passer à autre chose au plus vite : 

"L'agent/coach/manager de mon père"

J'ai rouvert mon œil caché, un peu impassible jusqu'à ce qu'un simple sourire donna un peu de vie à mon visage. Je pris d'une main lente le plan de ses mains, pour mieux n'en faire qu'un bout de chiffon, histoire de passer mon agacement de ma propre personne sur autre chose. Je revins à l'œil magenta, à mon nouvel interlocuteur. Ma main jeta la boule de papier d'un geste lent dans la corbeille, comme s'il s'agissait d'un panier de basket, l'y mettant de justesse. Ma voix se fit murmure, murmure faussement amusé et se voulant léger. 

"Ce truc, ouais, il ne te servira à rien sauf à te torcher le cul."

J'ai posé deux doigts sur mes lèvres, penchant la tête de côté, mon cocard toujours aussi soigneusement caché par mes cheveux. Le regard ailleurs, je réfléchissais à sa question, et surtout à comment j'allais l'aider, moi qui avait découvert le pensionnat par mes propres moyens. Je remis ma main dans ma poche, me plongeant à nouveau dans son regard à l'unicité de plus en plus troublante. 

"Je vais te faire visiter du moins fun au plus fun okay ?"

J'avais encore du mal avec le japonais, mon accent amércain était plus que présent et je hachais les mots d'une manière peu concluante. J'ai mordillé ma lèvre inférieure un instant, et continua, tentant d'être plus bavard que d'habitude : 

"Tes bagages sont déjà arrivés dans ta chambre ? T'as ta clé ? Au fait, c'est quoi ton nom ? Car je sais pas toi, mais je trouve ça chiant de ne pouvoir parler à quelqu'un sans l'appeler par son nom."

Mon japonais était vraiment merdique...